Alligators 427

ALLIGATORS 427

(Paroles et Musique : H.-F. Thiéfaine)

Alligators 427
Aux ailes de cachemire safran
Je grille ma dernière cigarette
Je vous attends
Sur cette autoroute hystérique
Qui nous conduit chez les mutants
J’ai troqué mon coeur contre une trique
Je vous attends
Je sais que vous avez la beauté destructive
Et le sourire vainqueur jusqu’au dernier soupir
Je sais que vos mâchoires distillent l’agonie
Moi je vous dis bravo et vive la mort !

Alligators 427
A la queue de zinc et de sang
Je m’tape une petite reniflette
Je vous attends
Dans cet étrange carnaval
On a vendu l’homo sapiens
Pour racheter du Neandertal
Je vous attends
Et les manufactures ont beau se recycler
Y aura jamais assez de morphine pour tout le monde
Surtout qu’à ce qu’on dit vous aimez faire durer
Moi je vous dis bravo et vive la mort !

Alligators 427
Aux longs regards phosphorescents
Je mouche mon nez remonte mes chaussettes
Je vous attends
Et je bloque mes lendemains
Je sais que les mouches s’apprêtent
Autour des tables du festin
Je vous attends
Et j’attends que se dressent vos prochains charniers
J’ai raté l’autre guerre pour la photographie
J’espère que vos macchabées seront bien faisandés
Moi je vous dis bravo et vive la mort !

Alligators 427
Aux crocs venimeux et gluants
Je donne un coup de brosse à mon squelette
Je vous attends
L’idiot du village fait la queue
Et tend sa carte d’adhérent
Pour prendre place dans le grand feu
Je vous attends
J’entends siffler le vent au-dessus des calvaires
Et je vois les vampires sortir de leurs cercueils
Pour venir saluer les anges nucléaires
Moi je vous dis bravo et vive la mort !

Alligators 427
Aux griffes d’or et de diamant
Je sais que la ciguë est prête
Je vous attends
Je sais que dans votre alchimie
L’atome ça vaut des travellers-chèques
Et ça suffit comme alibi
Je vous attends
A l’ombre de vos centrales je crache mon cancer
Je cherche un nouveau nom pour ma métamorphose
Je sais que mes enfants s’appelleront vers de terre
Moi je vous dis bravo et vive la mort !

Alligators 427
Au cerveau de jaspe et d’argent
Il est temps de sonner la fête
Je vous attends
Vous avez le goût du grand art
Et sur mon compteur électrique
J’ai le portrait du prince-ringard
Je vous attends
Je sais que désormais vivre est un calembour
La mort est devenue un état permanent
Le monde est aux fantômes, aux hyènes et aux vautours
Moi je vous dis bravo et vive la mort !


Alligators 427, 113e cigarette, Groupie 89… Vos chansons piochent aussi dans l’imaginaire chiffré.
Cela vient sans doute d’une vengeance contre les profs de maths ! Surtout, je suis observateur, on est environné de chiffres. Ils font partis du langage qui est ma matière première et ils donnent de la précision dans l’image. Par exemple, Alligators 427 il y a un rapprochement avec le Boeing 747 de la même époque, c’est cette image que je veux donner à mon monstre.
12/11/2018 – Midi Libre 


Alligators 427
Je viens bousculer le citoyen qui pense que, parce qu’il a une assurance chez Axa, il est tranquille.
01/03/2011 – Ouest-France


Avec un côté très visionnaire, cela vous arrive t-il, de votre côté, avec le recul, que vous soyiez surpris de la justesse de ce que vous avez pu chanter dans le passé ?
Je regarde toujours vers le futur donc je ne peux pas vous dire que je regarde mon passé et que je m’en flatte. Bien sûr quand j’ai écrit Alligators 427 en 1976 c’était pour ne pas avoir de Tchernobyl dix ans plus tard, c’est l’une des fois où j’ai senti que j’avais malheureusement raison.
Août 2004 – Pierre Derensy


Etais-tu au bord du gouffre quand tu as écrit Alligators 427 ?
Complètement. Place d’Italie, dans cet hôpital spécialisé dans la recherche contre le cancer et la tuberculose. Seul hôpital gratuit en 1976.
Mai 2001 – Canalchat.com