Quand la banlieue descendra sur la ville

QUAND LA BANLIEUE DESCENDRA SUR LA VILLE

(Paroles et musique : H.-F. Thiéfaine)

J’ai appris hier …

Combattants dans les rues qui puent la trique
La moiteur rance & la mauvaise conscience
Gargouilles ricanantes aux vitrines gothiques
Dans la noria des brancards en cadence
On n’entend plus crapuler dans le vent
Les discours des leaders & des tribuns
Tous les mornes aboyeurs de slogans
Les sycophantes & les théoriciens

Bourgeoises hallucinées dans les poubelles
Qu’elles n’auraient jamais dû quitter naguère
Quatre-vingt neuf c’était leur truc à elles
Maintenant ça change de date partenaires
J’espère que l’on assassinera Mozart
& sa zikmu pour noces & matchs de foot
& qu’y aura du beau tag sur ces boulevards
Plus spleeneux qu’une seringue après un shoot

Quand la banlieue descendra sur la ville
Pour la grande razzia des parias
Quand la banlieue descendra sur la ville
Pour le grand basta des rastas

Eh mec tu t’acharnes à tirer les stores
Pour te cacher de la rue en chaleur
& tu dis du bout de tes dents en or :
« Dommage que Dieu soit plus à la hauteur »
Faut être saturé d’un rare espoir
Pour danser dans les ruines des limousines
Y a ta BM qui crame sur le trottoir
Dis-toi que c’est beau comme un choeur d’orphelines

Quand la banlieue descendra sur la ville
Quand la banlieue descendra sur la ville

Mercenaires de Lilith contre miliciens d’Eve
Dans la fumée des incendies sanglants
La rue s’effondre & le peuple se lève
& j’avoue que ça me laisse pas indifférent
Je débouche un autre vieux Corton-Charlemagne
En compagnie de ravissantes call-girls
Qui fument joyeuses en dégrafant leurs pagnes
De la sinsémilla dans mon brûle-gueule

Quand la banlieue descendra sur la ville
Pour la grande razzia des parias
Quand la banlieue descendra sur la ville
Pour le grand basta des rastas


Extrait du CD-ROM Défloration 13
c’était au milieu des années 90, au plus profond de la crise… chaque fois que j’arrivais à paris par le train, à la gare de lyon, je pouvais me rendre compte de l’évolution des dégâts… l’entrée de la gare ressemblait de plus en plus à la cour des miracles, avec ses mendiants, ses paumés et ses chômeurs désemparés par leur nouvelle situation…
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il se trouva que je me perdis dans les quartiers ouest de paris (16ème – 17ème) que je connais très peu
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mais l’esthète en moi était mal dans sa peau… sans cesse, mon esprit retournait vers la gare de lyon avec tous les visages désespérés de ces hommes perdus… de ce fugitif instant d’égarement dans l’ouest, naquit très vite en moi le concept de « quand la banlieue descendra sur la ville »… concept que j’ai lâchement laissé mûrir quelques années avant de me mettre sérieusement à la tâche…
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Pensez-vous que ce qui arrive ces jours-ci dans les banlieues est une réaction obligatoire à la répression de plus en plus forte, ainsi qu´à la misère sociale qui prend des proportions folles ?
C´était prévisible. Partout où il y a des ghettos ! Ce qui se passe aujourd’hui s’est passé aux USA il y a 10 ans à Watts en Californie. Les américains nous avaient prévenu vu notre façon de concevoir les villes que cela allait péter un jour. Comme en France on se fout de tout surtout quand ça vient de l´étranger, c´est clair que ce n’est qu’un début.
Le Mag – 10 Novembre 2005