L’idiot qu’on a toujours été

L’IDIOT QU’ON A TOUJOURS ÉTÉ

(Paroles : H.-F. Thiéfaine – Musique : Lucas Thiéfaine)

Quelque part dans la brume un voyant solitaire
S’éloigne et disparaît sous les traits d’un enfant
Et son langage abstrait étoilé de mystères
Nous dévoile un futur prophétique alarmant
Sous les bulles de rosée et les vagues incertaines
Qui brillent dans nos regards lointains de naufragés
On entend le murmure effrayant des sirènes
On redevient l’idiot qu’on a toujours été

On redevient toujours l’ombre qui sonne le glas
Le trou noir qui dévore son étoile en faillite
On redevient toujours l’ombre dans le magma
Qui souffle d’effarants degrés Fahrenheit
On redevient l’idiot qu’on a toujours été

Le nom des prédatrices nous remonte en mémoire
À travers l’alphabet des souvenirs malsains
Quand les amants perdus s’inventent un purgatoire
Et mendient l’assistance des esprits souterrains
Mais loin des muses obscènes au sourire cannibale
Des érinnyes toxiques dont on a fait sécher
Le venin qui sert d’encre aux tampons pour leur bal
On redevient l’idiot qu’on a toujours été

On redevient toujours l’ombre qui sonne le glas
Le trou noir qui dévore son étoile en faillite
On redevient toujours l’ombre dans le magma
Qui souffle d’effarants degrés Fahrenheit
On redevient l’idiot qu’on a toujours été

Après les ovations du dimanche des rameaux
Le dieu mourant revient pour son vendredi saint
À l’heure où les putains, les traîtres et les bourreaux
Se rassemblent et défilent devant le sanhédrin
L’heure où l’on voit tourner les démons de nos veilles
Sur l’éternel manège où sombrent nos pensées
Et quel que soit le sens des astres dans le ciel
On redevient l’idiot qu’on a toujours été

On redevient toujours l’ombre qui sonne le glas
Le trou noir qui dévore son étoile en faillite
On redevient toujours l’ombre dans le magma
Qui souffle d’effarants degrés Fahrenheit
On redevient l’idiot qu’on a toujours été

Dans l’alchimie des villes éclaboussées de sève
On voit des molécules qui cherchent l’horizon
Des archets de violons qui se transforment en glaives
Et des chants inutiles sur de vaines partitions
Nos corps sont des accords sur des ruines en puissance
La musique c’est la mort qui s’invite dans la danse
Et les mots sont des trous sanglants dans le silence


« Je dis qu’il faut être voyant »
Arthur Rimbaud, Lettre du Voyant


Cette phrase dans le disque sur L’idiot qu’on a toujours été : « On naît, on s’élève mais la société qui nous entoure nous replonge dans les abysses d’idiotie » ? On perd nos acquis ?
Il y a un fil rouge qui sous-tend toute ma vie, c’est un fil noir, cette vision triste du monde. Il m’arrive de prendre du plaisir, de connaître des moments de joie. Mais ma vision en profondeur est sombre.
07/10/2021 – Paris Match


Et il y a aussi une part de revendication de la folie. Dans L’Idiot qu’on a toujours été, par exemple…
On peut avoir les situations et le monde qui bougent autour de soi mais on est toujours celui qui ne sait rien, l’ignorant. C’est un retour sur soi pour essayer de s’analyser comme on est et non pas comme on croit être. Cela correspond à une crise d’humilité peut-être… J’aime bien les gens humbles (il rit) ils sont quand même plus agréables à fréquenter que ceux qui sont sûrs d’eux !
15/10/2021 – RFI Musique