Le Jeu de la folie

LE JEU DE LA FOLIE

(Paroles : H.-F. Thiéfaine – Musique : Philippe Paradis)

Cimetière de Charleville, cimetière d’Auvers sur Oise
Mon âme funérailleuse me fusille le cerveau
Il est fini le temps des laudanum-framboise
Et le temps des visites au corbeau d’Allan Poe
Voici la voile noire du navire de Thésée
Qui me déchire les yeux au large de Sounion
Où un stupide anglais prétentieux a gravé
Comme un vulgaire touriste le nom de Lord Byron

Le jeu de la folie est un sport de l’extrême
Qui se pratique souvent au bord des précipices
Où dans les yeux des filles au bout des couloirs blêmes
Des labyrinthes obscurs aux fumeux artifices

Ne m’attends pas ce soir car la nuit sera noire
& blanche, illuminée, rue de la vieille lanterne
Où Nerval a pendu son linge & sa mémoire

Sous le regard des dieux, au bout d’un drap en berne
Je rêve de transparence & d’épouvantes mystiques
Le long de la frontière qui jouxte l’inconnu
En traînant mon cadavre & mon vide pathétique
& ma douleur femelle sur mon dos de bossu

Le jeu de la folie est un sport de l’extrême
Qui se pratique souvent au bord des précipices
Où dans les yeux des filles au bout des couloirs blêmes
Des labyrinthes obscurs aux fumeux artifices

Baudelaire est mort hier, à 11 heures du matin,
En zoomant d’apaisantes nuées crépusculaires,
Fatigué d’un été qui le rongeait sans fin
& de l’hargneuse odeur des furies sanitaires
Moi, je pars pour Dublin sur un nuiteux cargo
Qui traverse le temps perdu de la sagesse
& rejoins le bateau ivre d’Arthur Rimbaud
Dans le flux des bateaux tankers d’Arthur Guinness

Le jeu de la folie est un sport de l’extrême
Qui se pratique souvent au bord des précipices
Où dans les yeux des filles au bout des couloirs blêmes
Des labyrinthes obscurs aux fumeux artifices

 


Le feu de la folie est un sport de l’extrême qui se pratique au bord des précipices. Vous l’avez pratiqué, vous êtes déjà tombé ?
Quand on écrit, quand on compose, on est sur une arête. D’un côté il y a la création artistique, de l’autre côté il y a la folie. Alors on a toujours un peu peur, on ne sait jamais très bien de quel côté on va chuter. J’ai souvent eu peur de tomber. Je pense que parfois j’ai dû frôler la folie…
TSR – 25/03/2007