Heinrich HEINE (1797-1856)

Heinrich Heine est né à Düsseldorf, de parents juifs sans fortune, le 13 décembre 1797 sous le nom de Harry Heine.

Sa ville natale dominée par les Français se caractérisait par un large esprit de tolérance, notamment vis-à-vis de la condition juive. Il sera un admirateur effréné de la révolution française voyant en Napoléon Bonaparte la liberté incarnée.

En 1824, il rencontre Goethe à Weimar. Détesté parce que juif, internationaliste et progressiste, il sera l’homme à abattre des nationalistes allemands. L’année suivante, Il se convertira au luthéranisme afin d’accéder à une fonction publique. Rejeté par sa communauté comme traître, il finit par se haïr d’être juif, mais aussi d’être allemand.

Il arrive à Paris en juin 1831 comme correspondant de la Gazette d’Augsbourg, et il prend dès l’abord une position originale, écrivant tour à tour en allemand et en français, servant d’intermédiaire entre deux pays, de trait d’union entre deux littératures. Bientôt se forme autour de lui tout un groupe de collaborateurs, dont le plus ingénieux fut Gérard de Nerval. Il se liera d’amitié avec George Sand, Honoré de Balzac, Alfred de Musset. Friedrich Nietzsche sera l’un de ses plus fervents admirateurs.

En décembre 1835, la Diète germanique condamne tous les écrits de la «Jeune Allemagne». Heine en faisant partie en raison de sa critique mordante de la situation en Allemagne, il doit se résoudre à finir ses jours en exil.

Une affection de la moelle épinière le cloue à partir de mai 1848 sur son lit de douleur, sa «tombe de matelas» (Matratzengruft), comme il l’appelait.

Malgré son état physique des plus misérables, il conserva une admirable fraîcheur d’esprit, et c’est alors qu’ont pris naissance certaines de ses plus importantes productions en prose. Il revient aussi à la poésie, où s’entremêlent l’élégie, la confession intime et l’espoir politique.

Ses huit années d’agonie s’achevèrent le 17 février 1856 à Paris.
Dans son testament, il remercie la France de l’hospitalité qu’elle lui a donnée.

Nombre de ses poèmes ont été transposés en musique, notamment par Franz Schubert -le Chant du cygne-, Robert Schumann -les Amours du poète- et tant d’autres : Brahms, Mendelssohn, Grieg, Reger, Richard Strauss, Liszt, Cornélius… L’un d’entre-eux, Die Loreley, inspirera de nombreux écrivains ou auteurs contemporains : Guillaume Apollinaire, Gérard de Nerval, Mark Twain, Charles Trénet (1956), Hubert-Félix Thiéfaine (1982), Jacques Higelin (1985), Scorpions (2010)…


Loreley Die Loreley
Mon Coeur, pourquoi ces noirs présages ?
Je suis triste à mourir.
Une histoire des anciens âges
Hante mon Souvenir.Déjà l’air fraîchit, le soir tombe,
Sur le Rhin, flot grondant;
Seul, un haut rocher qui surplombe
Brille aux feux du couchant.Là-haut, des nymphes la plus belle,
Assise, rêve encore;
Sa main, où la bague étincelle,
Peigne ses cheveux d’or.Le peigne est magique. Elle chante,
Timbre étrange et vainqueur,
Tremblez fuyez ! la voix touchante
Ensorcelle le coeurDans sa barque, l’homme qui passe,
Pris d’un soudain transport,
Sans le voir, les yeux dans l´espace,
Vient sur l’écueil de mort.

L’écueil brise, le gouffre enserre,
La nacelle est noyée,
Et voila le mal que peut faire
Loreley sur son rocher.

Ich weiß nicht was soll es bedeuten,
Dass ich so traurig bin;
Ein Märchen aus alten Zeiten,
Das kommt mir nicht aus dem Sinn.Die Luft ist kühl und es dunkelt,
Und ruhig fließt der Rhein;
Der Gipfel des Berges funkelt
Im Abendsonnenschein.Die schönste Jungfrau sitzet
Dort oben wunderbar;
Ihr goldnes Geschmeide blitzet,
Sie kämmt ihr goldenes Haar.Sie kämmt es mit goldenem Kamme
Und singt ein Lied dabei;
Das hat eine wundersame,
Gewaltige Melodei.Den Schiffer im kleinen Schiffe
Ergreift es mit wildem Weh;
Er schaut nicht die Felsenriffe,
Er schaut nur hinauf in die Höh.

Ich glaube, die Wellen verschlingen
Am Ende Schiffer und Kahn;
Und das hat mit ihrem Singen
Die Lore-Ley getan.

Heinrich Heine (1824) Heinrich Heine (1824)